Depuis quelques années, chaque publication concernant le pied nu du cheval provoque des réactions très vives. Chaque pratiquant de telle ou telle méthode de parage la tient pour seule valable et la défend bec et ongles dans des discussions sans fin. Et vous, quelle méthode défendez-vous ? Et pourquoi ?
Un pied de cheval est un pied de cheval, et pourtant il existe de nombreuses approches et méthodes de parage !
Des méthodes de parage, il en existe beaucoup : orthopédie, podologie selon la méthode de KC La Pierre, parage selon Strasser, Jaime Jackson, Pete Ramey, Pierre Enoff… Toutes ces méthodes présentent des différences, tant dans la théorie que dans la pratique. Certaines avancent que le poids est porté par la paroi, d’autres par la sole, d’autres par les deux… Que le rôle de pompe du pied est dû à la descente de P2 ou à la compression du coussinet plantaire. Certaines préconisent de toucher la sole, seulement la sole crayeuse, ou de ne pas la toucher du tout. De tailler la fourchette ou de ne surtout pas le faire. De faire un roll, sur tous les chevaux, sur certains, ou sur aucun.
Comment ces gens en sont-ils arrivés à mettre au point des théories et des méthodes de parage si différentes en partant d’un objet commun, à savoir le pied du cheval ?
Certains ont découpé des pieds de chevaux morts et on réalisé des tests de physique ou de biomécanique. D’accord, mais ces pieds étaient séparés du corps qu’ils mettent en mouvement. D’autres ont observé les pieds de mustangs morts. Bon, ça donne une idée pour les chevaux qui vivent dans un environnement de désert ou de montagne. À condition que ces mustangs ne soient pas morts de maladie sans quoi ils ne seraient pas de très bon exemples de pieds sains. D’autres ont observé des pieds de mustangs vivants. C’est déjà mieux mais même réserve sur l’environnement. D’autres encore ont tâtonné et fini par trouver une façon de faire qui leur semble réussir au plus grand nombre de chevaux. Intéressant. Et pour autant l’un d’entre eux détient-il la vérité absolue ?
Les meilleurs juges d’une méthode de parage sont les chevaux
La douleur ou la sensibilité des pieds d’un cheval ne doivent pas être les seuls critères pour déterminer si une méthode de parage lui convient
Des centaines de chevaux sont parés chaque jour avec des méthodes différentes et s’en portent visiblement bien. Comment est-ce possible ? Comment un cheval peut-il marcher sur sa paroi et un autre sur sa sole et cela en étant tout aussi à leur l’aise l’un que l’autre ? Tout simplement parce que chaque cheval a sa propre sensibilité, se déplace sur un certain type de terrain, a un certain type d’aplomb, est pieds nus depuis tant de temps, etc. Bref, chaque cheval est différent et réagit donc différemment au parage. Et tous les chevaux n’ont pas le même seuil de douleur.
Alors pour savoir si un cheval est bien dans ses pieds, il ne suffit pas de se demander s’il a mal quand il marche. Parce qu’un cheval peut avoir les pieds sensibles du fait d’un DPIP ou autre dérèglement hormonal par exemple. C’est alors sans rapport avec la façon dont il est paré. Mais il se peut aussi que le pareur soit allé trop loin. Qu’il ait trop retiré de sole ou de paroi et que ce soit pour cette raison que le cheval boite. Et d’un autre côté, un cheval peut avoir très mal aux pieds et ne rien dire parce que telle est sa nature. La douleur n’est donc pas un bon critère, ou en tout cas elle ne doit pas être le seul critère.
Il faut une vision globale du cheval pour savoir s’il est réellement bien dans ses pieds
Pour savoir si un cheval est à l’aise dans ses pieds, il faut l’observer sur le terrain sur lequel il vit tous les jours. Sans quoi il est normal que son pied ne soit pas adapté au terrain.
Il faut aussi tenir compte d’éventuelles blessures qui pourraient modifier sa démarche. Considérer sa santé générale en cas de sensibilité. Il faut ensuite regarder comment il pose son pied mais pas seulement. Il est important de considérer les tensions musculaires dont il peut souffrir. Tensions qui peuvent attester des efforts qu’il fait pour ne pas avoir mal en marchant ou en station debout. Et discriminer les tensions qui sont liées à la posture et celles qui viennent du stress ou du travail. Ensuite, il faut aussi juger de l’état de santé du pied. Et faire la différence entre la fragilité d’une structure due à une erreur de parage et son mauvais état dû à une carence dans l’alimentation, à un milieu trop agressif (urine ou traitements du sol…) ou à un mauvais état général ou une maladie.
Juger de l’adaptation d’une méthode de parage à un cheval particulier est donc un travail plus compliqué qu’il n’y paraît. Alors que dire de l’adaptation d’une méthode de parage à un ensemble de chevaux, voire à tous les chevaux !
Alors qu’est-ce qu’un bon pareur ?
Quelle que soit sa façon de travailler, un bon pareur est celui qui se pose des questions. Celui qui adapte son parage à chaque cas, quitte à sortir de ses habitudes pour un cheval qui le lui indique. C’est un pareur qui regarde au-delà du pied, l’état général du cheval et de sa musculature. E qui est ouvert à la discussion. Parce qu’il sait qu’il ne détient pas la vérité absolue mais qu’il fait de son mieux pour le bien des chevaux. Un tel pareur mérite le respect, même si sa méthode n’est pas celle que vous connaissez ou que vous reconnaissez. Car tant que tout le monde ne sera pas d’accord sur une façon de faire, c’est que personne n’aura complètement raison ni complètement tord.
Il ne s’agit donc pas tant de choisir le pratiquant de telle ou telle méthode de parage. Il s’agit plutôt de choisir la bonne personne. Celle qui est douce avec les chevaux, qui sait expliquer ce qu’elle fait et qui laisse les chevaux confortables dans leurs sabots.
Nous avons tous pour objectif la santé et le bien être des chevaux, alors plutôt que de nous critiquer, collaborons !
Et plutôt que de nous critiquer et de nous juger les uns les autres, ouvrons-nous au dialogue ! Échangeons, expérimentons, observons les résultats, remettons-nous en cause. Nous pareurs, parlons entre nous de nos différentes théories et méthodes. Expliquons-nous les uns aux autres pourquoi nous pensons ainsi. Partageons nos expériences avec les différents chevaux que nous rencontrons. Faisons de vraies études de cas pour comparer nos théories. Et acceptons de modifier ce qui doit l’être si l’un d’entre nous apporte un élément qui nous parle.
Nous ostéopathes, participons à ces études en comparant les tensions et blocages chez les chevaux parés de telle ou telle façon. Nous qui travaillons les chevaux, apportons aussi nos observations sur leur locomotion, la souplesse de leurs allures, la sûreté de leurs pieds etc en fonction du parage. Et vous, propriétaires, laissez à votre pareur le temps de trouver l’équilibre le mieux adapté à votre cheval. Partagez avec lui ce que vous ressentez entre deux parages.
Et cessons de nous juger les uns et les autres et surtout de décrier ceux qui font différemment de nous. Parce qu’ils ont aussi de bons résultats avec les chevaux qu’ils parent.
Alors qui que vous soyez, la prochaine fois que vous commenterez une photo d’un pied paré, ne dites pas :« ce n’est comme ça qu’il faut faire ». Demandez plutôt à la personne comment et pourquoi elle a fait tel ou tel choix. Pour mieux comprendre, pour découvrir une autre façon de faire ou de penser. Et, peut-être, pour évoluer dans votre propre approche du parage.